La semaine de 4 jours : une innovation RH qui répond aux besoins des collaborateurs ?
La gestion des ressources humaines est en constante évolution, caractérisée par la progression d’une gestion initialement autoritaire, paternaliste et centralisée vers une approche stratégique, participative et agile. En accordant une place centrale aux salariés, les principales préoccupations des employeurs s’alignent sur les désirs et besoins des collaborateurs et accordent une place prépondérante au bien-être, à la diversité et à l’inclusion, ce qui donne naissance à des innovations et de nouvelles pratiques RH.
Les ressources humaines face aux mutations sociales et organisationnelles
Depuis 1980, la gestion des ressources humaines en tant que discipline à part entière, apporte un regard nouveau sur la stratégie des entreprises et la gestion de leurs talents.
Sur cette période elle n’a cessé d’évoluer, en développant des sujets plus divers comme l’expérience employé, le bien-être, la flexibilité, l’apprentissage continu, l’utilisation de l’IA, et d’autres domaines encore.
En effet, ces dernières années ont été rythmées par une multitude d’expérimentations et de tendances émergentes.
Quelles pistes de réflexion face au besoin grandissant de liberté des salariés ?
Le concept d’entreprise libérée (suppression de la hiérarchie, autonomie et responsabilisation des employés) a été théorisé et popularisé en 2009 par Isaac Getz dans son ouvrage Liberté & Cie : Quand la liberté des salariés fait le succès des entreprises. En 2010 le concept d’holacratie a, quant à lui, gagné en popularité avant d’être formellement introduit en 2015 par Brian J. Robertson dans son livre Holacracy : the new management system for a rapidly changing world.
L’holacratie est considérée comme la phase ultime de l’entreprise libérée : non seulement la hiérarchie pyramidale est éliminée, mais le principe de services (départements) l’est également. Dans ces systèmes, les décisions sont prises par consentement ou consensus.
Portés par la pandémie de la COVID, d’autres projets visent à introduire ou satisfaire le principe du tout portatif, tout dématérialisé, où chaque salarié peut se déplacer librement en abandonnant la culture des postes individuels : le flex-office. Accompagné du mode de travail hybride (télétravail et travail sur site en alterné), ces deux modèles d’organisation ne cessent de se déployer : fin 2022, 57% des travailleurs « de bureau » bénéficiaient du mode de travail hybride, contre seulement 26% en 2021 (selon Ipsos pour Ringcentral). Les salariés des entreprises ont néanmoins exprimé leurs inquiétudes, telles que la diminution des liens sociaux et les difficultés d’intégration en dépit d’une collaboration efficace.
D’autres expérimentations moins connues, et pourtant en plein essor existent, comme les congés spéciaux (congés non-rémunérés pour s’occuper d’un proche en difficulté, PwC) ou les congés menstruels (1 jour par mois, Le Wagon et Carrefour). Aux États-Unis, certaines entreprises vont même jusqu'à octroyer à leurs salariés 10 jours de congés payés pour prendre soin de leur animal de compagnie.
Par exemple LIDL propose également des aménagements de plannings ou encore des journées alternées (possibilité de travailler seulement une demi-journée).
Et une autre transformation importante semble avoir le vent en poupe : la semaine de 4 jours.
La semaine de 4 jours : utopique ou réaliste ?
Quels objectifs et avantages pour les entreprises et les salariés ?
6 objectifs majeurs peuvent être identifiés :
- L’amélioration de l’équilibre travail / vie personnelle permet aux salariés de bénéficier de plus de temps ce qui génère une réduction du stress et de la fatigue, et donc une augmentation du bien-être.
- Des semaines de travail plus courtes augmentent la productivité, favorisent la concentration, l’efficacité, la créativité et l’engagement. 64% des dirigeants d'entreprise confirment ces bénéfices.
- Avec un bien-être augmenté et des périodes de repos plus conséquentes, la fatigue est réduite ainsi que l’absentéisme lié aux congés maladie. Les démissions et démissions silencieuses (l’employé ne démissionne pas formellement mais n’est plus productif) sont limitées.
- L’attractivité pour les talents est aussi un des objectifs principaux. En effet, les jeunes fraîchement arrivés sur le marché du travail sont sensibles à l’argument d’un meilleur équilibre « vie pro/vie perso ».
- Enfin, cette réorganisation du travail permet parfois la fermeture des locaux un jour supplémentaire entrainant ainsi une réduction de la consommation de ressources, des coûts et de l’empreinte carbone.
Sources: LegalySpace : Quel est l’impact pour les sociétés de mettre en place la semaine de travail de 4 jours ?
Gallup : Is the 4 day work week a good idea ?
Pionnier en la matière, en 2021 le leader français du e-commerce de produits électroniques, LDLC, s’est lancé dans la mise en place de la semaine de 4 jours. Après 2 ans d’expérimentation les salariés confirment ces avantages en exprimant :
- Une réduction du stress, de l’anxiété et de la fatigue
- Un engagement accru, un plus fort sentiment d’appartenance, et un meilleur ressenti d’implication et de satisfaction
- Un meilleur équilibre vie professionnelle / vie personnelle
Et les points positifs entreprise/employeur remontés par une étude interne sont :
- La productivité, qui a augmenté de 20% en moyenne
- L’absentéisme, qui a été réduit
- L’attractivité, qui a été augmentée (15ème place du palmarès Best Workplaces France 2023)
Finalement, le bilan est positif tant du point de vue employeur que du point de vue employé. Laurent de la Clergerie, le fondateur, est d’ailleurs formel : il ne reviendra pas en arrière, "la semaine de 4 jours fait désormais parti de la culture de l’entreprise".
Mais quelles limites et difficultés à la mise en place ?
Ce nouveau système proposé par la direction doit préalablement être voté et accepté par les syndicats et l’IRP (Instance unique des Représentants du Personnel). Certains obstacles s’immiscent dans sa mise en place et peuvent se classer selon 3 catégories :
Les obstacles culturels :
- Culture des 5 jours : difficultés pour changer les habitudes des salariés en passant de 5 à 4 jours.
- Présentéisme : en France la culture du présentéisme est ancrée dans les esprits avec une valorisation de la présence au travail. La mise en place de ce type d’aménagement nécessite une confiance orientée vers les résultats et la productivité plutôt que sur le temps passé au bureau.
- Conduite du changement : l’accompagnement des salariés dans l’adoption de cette nouvelle organisation est important pour palier la résistance au changement et éviter toute baisse de productivité.
Les obstacles organisationnels :
- Outils et processus : la gestion de projet peut être bouleversée par ce changement nécessitant une adaptation des outils pour permettre aux salariés de gagner en autonomie et en flexibilité.
- Communication et coordination : elles doivent être renforcées pour garantir une collaboration efficace, notamment lorsque les jours de travail sont différents d’un individu à l’autre.
- Continuité de l’activité : certaines entreprises ne peuvent fermer leurs locaux un jour supplémentaire et doivent disposer d’un nombre suffisant de salariés sur site.
Les obstacles financiers :
- Sans une adaptation des contrats, l’entreprise peut faire face à un surcoût salarial.
- En dépit de l’augmentation de la productivité générée, le recrutement de nouveaux talents peut être nécessaire.
Plus récemment est née une version dévoyée de la semaine « de » 4 jours : la semaine « en » 4 jours :
• La semaine « de » 4 jours implique une réduction du temps de travail total (de 35 à 32h par semaine, par exemple).
• La semaine « en » 4 jours, quant à elle, maintient les heures de travail habituelles mais les condense sur 4 jours au lieu de 5.
Conclusion
Les nouvelles pratiques en matière de gestion des ressources humaines démontrent une évolution majeure dans le paradigme du travail. À travers ces expérimentations, les entreprises parviennent à réinventer leur organisation tout en améliorant le bien-être de leurs salariés. Le succès croissant de la semaine de 4 jours ainsi que de l’ensemble de ces nouvelles pratiques, s’accompagne ainsi d’une augmentation de la productivité. Mais cela implique de bien reconnaitre et surmonter les potentiels obstacles à leur mise en place.
EXEIS Conseil peut vous accompagner dans vos réflexions autour des évolutions de vos modes de travail, comme par exemple la mise en place de la semaine de 4 jours. Nous assurons le cadrage du projet jusqu'à sa mise en œuvre, en incluant l'élaboration d’un plan d'accompagnement des collaborateurs.