Vers un futur vert : l’hydrogène, énergie de demain ? 

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Depuis plusieurs années, l’impulsion européenne en matière de décarbonisation a propulsé l’hydrogène comme vecteur énergétique de la transition. Dans cette grande course à la neutralité carbone, les entreprises doivent adapter leurs stratégies et ajuster leurs structures organisationnelles pour rester compétitives, tout en améliorant leur efficacité et leur image de marque. Alors, comment l’intégration de l’hydrogène influence-t-elle les stratégies RSE et les structures organisationnelles des entreprises engagées dans la transition énergétique? 

Les mesures européennes et nationales pour l’accélération de la transition vers l’hydrogène 

Depuis 2015, l’Accord mondial de Paris sur le climat a justement fixé des objectifs de réduction d’émission de gaz à effet de serre (GES) en encourageant les nations à explorer des alternatives, telles que l’hydrogène, pour décarboner leurs économies. Suivi en 2019 par le « Green Deal européen », le plan « Fit for 55 » en 2021 et confirmé la même année par le 6ème rapport du GIEC avec la nécessité de ramener les émissions mondiales de CO₂ à zéro. C’est finalement le plan « REPowerEU » de 2022, visant à mettre fin à la dépendance aux combustibles fossiles, qui vient apporter une dernière impulsion à cette transition énergétique.  

Pour mettre en place sa stratégie, l’Europe a appelé à la coopération internationale et à la mutualisation des moyens. Différents projets portés par plusieurs pays ont ainsi vu le jour, en s’inscrivant dans les IPCEI (Important Project of Common European Interest). Elle a également défini une feuille de route des investissements : 

Appuyée par l’Europe, la France bénéficie d’importants soutiens financiers pour développer ses projets énergétiques. Des collaborations avec divers acteurs naissent de ces investissements, comme en témoignage le projet « European Hydrogen Backbone », qui vise à relier les réseaux d’hydrogène des pays européens en 2040, en construisant et en adaptant des gazoducs. Plus d’infos.

L’évolution de ce nouveau vecteur énergétique 

Grâce à l’augmentation de la performance des moyens de production, aux innovations en matière de transport, de distribution et de stockage, l’hydrogène devient de plus en plus accessible

Ces évolutions technologiques permettent également une importante réduction des coûts de production. Afin de rendre l’hydrogène vert aussi compétitif que celui produit à partir d’énergie fossile, les prix de 4€ à 6€/kg pour le vert, contre 1,5€ à 2,5€/kg en production à partir d’énergies fossiles doivent s’aligner d’ici 2030. 

Aussi, historiquement dominé par seulement quelques secteurs industriels, l’hydrogène trouve désormais sa place dans le paysage de la mobilité et du transport avec de nouvelles applications : 

L’hydrogène a le potentiel d’induire des mutations significatives dans les entreprises grâce à la variété de ses applications. En effet il peut être utilisé comme source d’énergie directe, comme composant pour d’autres produits chimiques ou encore comme moyen de stocker l’énergie excédentaire. 

Les opportunités de l’hydrogène renouvelable

Depuis l’ordonnance n°2021-167 du 17 février 2021, l’hydrogène est officiellement classé selon trois catégories : carboné, bas-carbone et renouvelable ; Selon leur méthode de production (thermique à combustibles fossiles, nucléaire, éolien, solaire, hydraulique…). 

Bien que la production d’hydrogène bas-carbone soit encore considérée comme une solution transitoire nécessaire, pour s’orienter progressivement vers l’hydrogène vert, c’est uniquement ce dernier, aussi appelé « hydrogène renouvelable », qui fait l’objet d’une attention particulière dans les stratégies de développement durable. 

Les avantages de l’hydrogène vert 

En premier lieu, le passage à l’hydrogène vert permet de considérablement réduire les émissions de GES et, indirectement, de soutenir le développement des énergies renouvelables. Aussi, la diversité de ses applications est un point crucial puisqu’il contribue à transformer une variété de secteurs. Il apporte également une solution efficace à l’un des défis majeurs de la gestion des ressources : le stockage d’énergie. 

Les opportunités pour les entreprises 

En plus de contribuer à la durabilité environnementale, l’adoption de l’hydrogène vert offre plusieurs avantages stratégiques et opérationnels : 

  • Grâce aux projections, les entreprises peuvent anticiper la montée en compétitivité de l’hydrogène et la réduction progressive des énergies fossiles pour initier leur transition énergétique. Elles peuvent également se mettre en conformité avec les réglementations d’émissions de GES, en prévision de leur renforcement dans les prochaines années. 
  • Les gouvernements offrant de plus en plus d’incitations financières, c’est aussi le bon moment pour amorcer cette transition. On peut par exemple citer le TCTF (Temporary Crisis and Transition Framework – Europe), ou le PIA (Programme d’Investissement d’Avenir – France). 

En plus de ces deux points, le passage à l’hydrogène a un impact significatif sur l’amélioration de l’image de marque dans un monde de plus en plus conscient des enjeux environnementaux, renforçant ainsi la capacité concurrentielle des entreprises.  

En somme, l’adoption de l’hydrogène vert peut positionner une entreprise comme un leader dans l’innovation en attirant des talents, en favorisant les investissements et en ouvrant la porte à de nouvelles opportunités de marché. 

Finalement, bien que les bénéfices environnementaux soient importants, les considérations économiques et réglementaires tendent aussi à dominer les décisions en matière d’adoption de nouvelles technologies et énergies propres. 

Les impacts de la transition 

Les impacts organisationnels 

Réorganisation interne et adaptation des savoir-faire 

L’adoption de l’hydrogène implique une refonte stratégique des entreprises. Il est nécessaire d’adapter les rôles et responsabilités pour répondre aux nouvelles exigences techniques et industrielles. Cela peut entraîner la création de nouveaux départements ou la transformation de divisions existantes afin d’améliorer l’excellence opérationnelle. 

Par ailleurs, cette transition requiert de nouveaux savoir-faire. Les entreprises doivent prévoir des formations internes ou recruter des experts pour accompagner cette transformation. Le personnel devra ainsi acquérir de nouvelles compétences pour assurer une adoption efficace et sécurisée de l’hydrogène. 

  • Exemple : Mettre en place un programme de formation interne pour familiariser les équipes aux spécificités de l’hydrogène et aux nouvelles réglementations associées. 

Adaptation des processus opérationnels

L’intégration de l’hydrogène entraîne des modifications structurelles dans les processus de production, de transport, de distribution et de stockage. Les ajustements nécessaires doivent garantir la sécurité et l’efficacité opérationnelle. 

Par ailleurs, les indicateurs de performance traditionnels doivent être adaptés pour refléter ces nouvelles priorités. Le suivi des performances énergétiques et environnementales devient un enjeu central. 

Gouvernance et pilotage de la transition 

L’adoption de l’hydrogène ne peut être menée efficacement sans une gouvernance adaptée. Il est impératif de structurer le pilotage de la transition en intégrant un cadre organisationnel clair, capable de coordonner les actions entre les différentes entités concernées. La mise en place de comités de pilotage dédiés permet d’assurer un suivi rigoureux des initiatives, d’aligner les objectifs stratégiques et d’anticiper les défis liés à l’adoption de ce nouveau vecteur énergétique. 

La définition d’indicateurs de performance spécifiques est également un levier essentiel. Ceux-ci doivent permettre d’évaluer l’avancement des projets et de mesurer l’impact réel de l’intégration de l’hydrogène, tant sur le plan économique qu’environnemental. Il s’agit ainsi d’inscrire cette transition dans une dynamique de long terme, en garantissant un suivi continu et une adaptation des stratégies en fonction des évolutions du marché et des réglementations. 

Gestion des risques et conformité réglementaire 

L’hydrogène, en tant que vecteur énergétique émergent, s’accompagne d’exigences réglementaires strictes et d’un cadre normatif en constante évolution. Il est donc primordial pour les entreprises d’assurer une veille réglementaire rigoureuse afin d’anticiper les ajustements nécessaires et d’éviter tout risque de non-conformité. 

Cette vigilance s’étend également aux aspects opérationnels et sécuritaires. La mise en œuvre de plans de gestion des risques adaptés est essentielle pour prévenir les incidents liés à la manipulation, au stockage, au transport et à la distribution de l’hydrogène. La formation des équipes à ces nouvelles normes de sécurité, ainsi que l’élaboration de protocoles stricts, permettent de minimiser les risques et d’assurer une transition maîtrisée. 

Dans ce contexte, où les réglementations évoluent rapidement pour encadrer l’usage de l’hydrogène, il est indispensable de mettre en place des mécanismes d’adaptabilité organisationnelle. Cela implique une collaboration étroite avec les autorités compétentes (DGEC1, ADEME2, CRE3, INERIS4, …) et les organismes de certification afin de garantir une mise en conformité continue et une intégration fluide de l’hydrogène dans les processus industriels et logistiques. 

La transformation des Systèmes d’Information 

Collecte, traitement et exploitation des données 

L’adoption de l’hydrogène repose sur la capacité des Systèmes d’Information à collecter, analyser et exploiter des volumes de données toujours plus importants. Les infrastructures doivent être en mesure de surveiller en temps réel des paramètres critiques tels que la pression, la température ou encore le volume de stockage. La fiabilité et la précision de ces informations sont essentielles pour garantir une exploitation sécurisée et optimisée de l’hydrogène. 

En parallèle, l’intégration d’outils analytiques avancés permet d’améliorer la gestion des flux énergétiques et d’anticiper la demande grâce à des modèles prédictifs. Cette approche contribue non seulement à renforcer l’efficience des opérations, mais également à maximiser les bénéfices liés à l’utilisation de ce vecteur énergétique. 

  • Exemple : Développer des tableaux de bord interactifs permettant de visualiser en temps réel les niveaux de production et de consommation d’hydrogène. 

Sécurisation des infrastructures numériques 

Ces changements dans les processus industriels exposent les infrastructures à de nouveaux défis en matière de cybersécurité. La multiplication des points d’entrée numériques et la nécessité d’échanger des données sensibles entre plusieurs acteurs accroissent les risques liés aux cyberattaques. 

Afin de prévenir ces menaces, il est essentiel d’adopter des protocoles de sécurité avancés et de renforcer la résilience des systèmes face aux tentatives d’intrusion. La mise en place de dispositifs de surveillance en temps réel, couplée à des mécanismes de détection et de réponse rapide, permet de protéger les actifs critiques tout en assurant la continuité des opérations. 

Interopérabilité et intégration avec les systèmes existants 

Cela impose également aux entreprises de connecter de nouveaux outils énergétiques à leurs systèmes d’information existants. Cette intégration doit se faire de manière fluide, sans générer de silos de données ou perturber les processus opérationnels en place. 

L’interopérabilité entre les plateformes de gestion énergétique, les logiciels industriels (ERP5, MES6, SCADA7, …) et les solutions IoT est un enjeu majeur. Une architecture flexible et modulaire permet d’assurer une transition progressive et d’optimiser la communication entre les différentes briques technologiques utilisées pour le suivi et la gestion de l’hydrogène. 

  • Exemple : Adapter les logiciels de gestion énergétique pour synchroniser les données issues des infrastructures hydrogène avec les autres sources d’énergie utilisées par l’entreprise. 

Automatisation et optimisation des opérations 

L’essor de l’hydrogène encourage le recours à des technologies intelligentes (on peut noter les avancées en matière d’IA par exemple) pour maximiser l’efficacité des opérations. L’automatisation des systèmes de contrôle et l’intégration d’algorithmes d’intelligence artificielle permettent de rationaliser la gestion des infrastructures et d’optimiser la consommation énergétique. 

Grâce à ces avancées, les entreprises sont en mesure de piloter plus efficacement leurs activités, d’anticiper les besoins en énergie et d’améliorer la performance globale de leurs installations. La mise en œuvre de solutions d’automatisation favorise également une meilleure réactivité face aux variations de la demande et aux contraintes réglementaires croissantes. 

  • Exemple : Automatiser le suivi des stocks d’hydrogène en intégrant des capteurs connectés capables de signaler en temps réel les niveaux de remplissage et les besoins en réapprovisionnement. 

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[1] DGEC : Direction Générale de l’Énergie et du Climat

[2] ADEME : Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (« Agence de la transition écologique » depuis 2020)

[3] CRE : Commission de Régulation de l’Énergie

[4] INERIS : Institut National de l’Environnement Industriel et des Risques

[5] ERP (Entreprise Resource Planning) : Logiciel de gestion intégrée centralisant les processus d’une entreprise.

[6] MES (Manufacturing Execution System) : Système de suivi et d’optimisation de la production en temps réel.

[7] SCADA (Supervisory Control And Data Acquisition) : Système de supervision et de contrôle des processus industriels.